Poésiade

Gourmandise

Claudette Louchart

C’était pendant l’horreur d’une profonde nuit

Je n’avais de recours pour tromper mon ennui

Que de me concentrer, si tant est qu’on le puisse

Sur un petit carré de bon chocolat suisse.

S’il ne s’était agi que d’un petit éclat

Ou même deux ou trois pour voir le goût qu’il a

La douceur n’aurait pas glissé, quoi que l’on dise

Sur le terrain miné du péché gourmandise…

Connaître la saveur, la finesse et le grain

De chaque échantillon, n’en ai pas de chagrin

Je tiens à comparer le fondu sur la langue

De tant de goûts divers, où toute raison tangue.

La papille excitée en dégustation

Ne se sent pas franchir la saturation

Et bientôt le plaisir fait place à la nausée

La tendre volupté est vite dégrisée.

Je dois le confesser : une telle leçon

A posé des jalons, jugulant la raison :

Le chocolat est bon si la confiserie

Se déguste en lenteur, avec parcimonie.